L’adjointe à l’urbanisme du maire (divers droite) de Montpellier, Philippe Saurel, a-t-elle respecté la loi « relative à la transparence de la vie publique », sur deux dossiers auxquels elle a pris part ? Une question à laquelle pourrait avoir à répondre la « Commission éthique » de la ville qui va être mise en place aujourd’hui à grand renfort de communication. (920 mots)
Par Jacques-Olivier Teyssier
Stéphanie Jannin ne pourra pas dire qu’elle n’a pas été présente sur le dossier Las Rébès, un projet de construction de logements sociaux dans ce quartier populaire. Alors que des habitants sont mobilisés pour défendre un espace vert menacé, l’adjointe à l’urbanisme n’a cessé de défendre le projet du bailleur social ACM qu’elle a même qualifié de « vertueux » (La Marseillaise, 20/07). Elle déclarait aussi à Montpellier journal qui a révélé l’affaire en avril 2015 (lire ici), à propos du permis de construire : « Un permis qui, il faut le dire, en tous points, a très bien respecté les demandes de la ville. » (1)
Intervenue directement sur le dossier
Plus récemment, elle s’est adressé plusieurs fois de façon très agressive à une élue d’opposition qui l’interrogeait sur ce projet en conseil municipal du 25 février (vers 1h40 de la vidéo) et l’adjointe a même déclaré avoir « demandé à ACM » de replanter des arbres ce qui montre qu’elle est intervenue directement sur le dossier. Elle a aussi pris « l’initiative » d’une réunion de concertation en mairie et, à cette occasion, elle déclare à Midi Libre (9/03) : « Le projet d’ACM se fera. Nous assumons ce choix politique. » L’adjointe relaiera même l’article sur son compte Twitter.
Mais au fait, qui est l’architecte de ce projet au coût annoncé de 5,2 M€ HT ? L’agence Lebunetel (lire ici p4). Qui n’est autre que… le dernier employeur de Stéphanie Jannin. Le citoyen qui voudrait avoir confirmation de cette dernière information sur le réseau professionnel Linkedin, se casserait les dents. En effet, le profil de l’élue-architecte qui pouvait encore être consulté le 9 mars (voir ici), ne l’est plus aujourd’hui : « Sorry, this profile could’nt be displayed » (désolé, ce profil n’a pas pu être affiché), nous dit Linkedin.
Un oubli
Le même citoyen ne pourrait pas non plus le vérifier sur le site de l’agence Lebunetel dans la rubrique « Ils ont collaboré avec nous » puisque le nom de l’élue n’apparaît pas dans la liste des 24 noms. Un oubli qui pourrait faire croire à une personne suspicieuse – ce que Montpellier journal n’est pas – qu’il est volontaire alors que, n’en doutons pas, il sera bien vite corrigé.
La confirmation officielle de l’ancien employeur de Stéphanie Jannin peut-être en revanche trouvée dans un arrêté, signé de la main de Philippe Saurel, « fixant les limites de l’exercice de la délégation de Mme Stéphanie Jannin, adjointe au maire déléguée à l’urbanisme et à l’aménagement durable ». Cet arrêté rappelle d’abord que, selon la loi, « constitue un conflit d’intérêts toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction ».
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« Susceptible de paraître en situation de conflit d’intérêts »
L’arrêté indique ensuite que Stéphanie Jannin, toujours conformément à la loi, a informé « monsieur le maire être susceptible de paraître en situation de conflit d’intérêts dans les relations qu’elle pourra avoir dans l’exercice de ses fonctions avec le cabinet d’architectes-urbanistes RKNL-Nicolas Lebunetel dont elle est salariée, en position de congés maternité ».
D’où le maire a arrêté : « Madame Stéphanie Jannin, première adjointe au maire [elle l'était encore, à l'époque], s’abstiendra d’exercer la délégation de fonctions lui ayant été consentie, dès lors que celle-ci sera susceptible de l’amener à traiter, de relations de quelque type que ce soit entre la ville et le cabinet d’architectes-urbanistes RKNL-Nicolas Lebunetel ». On pourrait se dire que le lien contractuel est ancien. Sauf que l’arrêté mentionne aussi l’agence Boyer-Percheron-Assus qui a employé Stéphanie Jannin de 2004 à 2011 (soit trois ans avant la signature de l’arrêté).
ACM en lien direct avec l’agence Lebunetel
Les actes de Stéphanie Jannin dans le dossier Las Rébès constituent-ils un conflit d’intérêts ? Même si c’est ACM qui est en lien direct avec l’agence Lebunetel, ces actes mettaient-ils l’adjointe dans une « situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts privés » qui était « de nature à influencer ou à paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif » de sa fonction d’élue ?
Ce n’est pas à Montpellier journal de répondre à ces questions juridiques mais plutôt à un juge, s’il était saisi, par exemple suite à la plainte d’un citoyen. Mais aussi à la « Commission éthique » de la ville de Montpellier qui va être mise en place cet après-midi en présence de Séverine Tessier, membre du conseil d’administration de l’association Anticor. On peut juste se demander si la prudence, voire la morale, n’aurait pas voulu que l’adjointe se mette en retrait sur ce dossier. En effet, si le projet d’ACM avait été abandonné parce que peu ou mal défendu par la ville de Montpellier, l’agence Lebunetel aurait perdu un chantier à plusieurs millions d’euros.
Toujours dans le même arrêté de Philippe Saurel, on notera aussi que Cyril Outrebon, le conjoint de Stéphanie Jannin, est président de la Maison de l’architecture Languedoc-Roussillon. Ce qui n’a pas empêché Stéphanie Jannin de prendre part au vote de la subvention de la ville à cette association le 7 mai 2015 (vers 1h26 de la vidéo). Le montant (17 150 €) est certes relativement modeste mais la Maison de l’architecture s’est quand même vu attribuer une subvention dont le montant est supérieur à environ 80 % des montants attribués aux 117 associations retenues pour assurer des activités périscolaires. Avec cette prestation supplémentaire, le montant annuel total des subventions versées par la ville à la Maison de l’architecture est ainsi passé de 4 500 € en 2013 à 19 150 € en 2015.
► Sollicitée ce matin par Montpellier journal, Stéphanie Jannin n’a, pour l’instant, pas donné suite.
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(1) Vus les délais de consultation des permis de construire, on n’a pas pu savoir si c’est Stéphanie Jannin qui a signé le permis de construire en personne. [Mise à jour le 11/04 à 12h : c'est Philippe Saurel qui a signé le permis de construire.]
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3 commentaire(s)
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à 15 h 47 min
J’ai eu l’occasion de rencontré S.Jannin officiellement dans un réception pour l’ambassadeur de Palestine il y a deux ans à le mairie de Montpellier. Elle représenté Saurel qui s’échappé à Paris. Elle a ignoré poliment le discours de l’ambassadeur pendant tout le réunion. C’est une bonne soldat, capable à tout.
Tito
à 23 h 03 min
J’ai quand même le sentiment d’un mauvais procès fait à une jeune et fraîche élue peu au fait des entourloupes politiques qu’on peut monter pour tuer le père à travers la fille ! Venant d’un site très ouvertement hostile au maire actuel, l’attaque ne surprend pas mais elle semble assez peu consistante par rapport à de vraies prises d’intérêt.
Quant à la maison d’architecture , elle est soutenue bien sûr et avec raison par des architectes de Montpellier dont le renom et l’entregent est sans commune mesure à Celui de Cyril Outrebon qui a un bel avenir mais qui a encore à se faire un nom sans forcément compter sur celui de son épouse . Ce n’est pas son genre et pour lui c’est même un handicap puisque , ça lui ferme la commande publique à Montpellier. Ah , que pour être un élu , il vaut mieux être fonctionnaire !
à 12 h 53 min
Les procès sont fait par la justice.
Montpellier journal n’est « hostile » à personne, il informe.
Nessus radote. Pour les non initiés, lire ici : http://www.montpellier-journal.fr/2015/01/quand-la-cgt-tam-rappelle-ses-promesses-enregistrees-a-philippe-saurel.html#comment-7330
et ici :
http://www.montpellier-journal.fr/2015/01/voeux-a-la-presse-de-saurel-ville-et-metropole-nourrissent-les-journalistes.html#comment-7338