Le 17 décembre, le juge confirme que la décision du préfet Claude Baland de refuser à l’un des demandeurs « l’admission au séjour au titre de l’asile, a porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit d’asile ». Exactement ce qu’avait déjà jugé le tribunal administratif de Montpellier, le 23 novembre, à propos de ce ressortissant transféré de Calais à Nîmes après l’évacuation de « la jungle ».
« Approche humaine »
Mais le ministre de l’immigration avait décidé de faire appel devant le Conseil d’État. Le secrétaire général de la préfecture de l’Hérault, Patrice Latron, déclarait pourtant à Montpellier journal, le 8 décembre, que, « pour montrer qu’il y a une approche humaine en préfecture » et « pour dépassionner le débat », la préfecture avait décidé de placer six demandeurs d’asile (dont celui visé par l’appel) en « procédure normale » (1). Le ministère voulait-il obtenir une jurisprudence sur laquelle s’appuyer pour de futurs cas ? Si oui, c’est raté. De plus, le Conseil d’État a même fait référence à « la situation de guerre qui règne [en Afghanistan], en particulier dans la région » dont est originaire le demandeur d’asile.
Commentaire de la Cimade dans un communiqué diffusé le 18 décembre et complété le 21 : « Au-delà du cas d’espèce, le Conseil d’État indique au ministère de l’Immigration qu’il est souhaitable de permettre aux Afghans qui demandent asile en France, d’avoir accès à une procédure normale et les garanties qui s’y attachent (admission au séjour, recours de plein droit suspensif, accès à un centre d’accueil pour demandeur d’asile ou à l’allocation temporaire d’attente) et qu’il ne peut se satisfaire de la procédure prioritaire en rétention avant un renvoi par charter, pour examiner leur demande. »
Notre beau pays
Interrogés dans « Le Grand journal » de Canal plus le 16 décembre (vers 23′), Nicolas Sarkozy a justifié le renvoi de neuf afghans dans leur pays par le fait qu’ils ne voulaient « même pas rester en France ». Michel Denisot qui interrogeait le président de la république, ne lui a malheureusement pas demandé pourquoi l’État ne permettait pas à ceux qui ont décidé de rester dans notre beau pays, de faire leur demande d’asile via une procédure normale – du moins dans un premier temps – et pourquoi le ministre allait même jusque devant le Conseil d’État pour empêcher l’un d’entre eux de le faire via cette procédure.
Sur les neuf personnes renvoyées le 16 décembre, Nicolas Sarkozy a quand même déclaré : « On a décidé d’appliquer la loi. En l’occurrence, elle est parfaitement respectueuse du droit des gens. » En tout cas, pour le cas examiné en Conseil d’État le 16 décembre (le même jour que le renvoi des neuf, hasard du calendrier), il est donc établi par le juge, que l’État n’avait pas appliqué la loi et même qu’il avait, via son préfet, « porté une atteinte grave » à une liberté fondamentale. En revanche, l’histoire ne dit pas ce qui se serait passé s’il n’y avait pas eu la Cimade pour aider cet Afghan dans ses démarches en centre de rétention, devant le juge des libertés et de la détention, devant le tribunal administratif de Nîmes, à la préfecture du Gard, à la préfecture de l’Hérault, devant le tribunal administratif de Montpellier puis devant le Conseil d’État et enfin peut-être devant l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Une chose est sûre, tout ça est bon pour l’emploi dans l’administration française et pour les revenus des avocats. Le 17 décembre, le Conseil d’Etat a condamné l’État a versé 2000 € à l’avocat du réfugié.
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(1) Sollicitée le 17 décembre, la préfecture n’a pas donné suite – ni même répondu négativement – à notre demande d’entretien.
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