Samedi, la police a retenu pendant 16h une personne sans-papier alors qu’elle avait déposé un dossier de régularisation. Elle a fini par être libérée après l’annonce d’une manifestation de soutien. La préfecture se refuse toujours à donner un récépissé aux déposants qui pourrait leur éviter d’être injustement privés de liberté.
Samedi soir, une personne sans-papier a été placée en garde à vue à Montpellier. Motif : « Séjour irrégulier », selon son avocat Me Christophe Ruffel. Problème, cette personne a déposé un dossier de régularisation, le 18 mai avec la Coordination des comités de soutien aux sans-papiers de Montpellier. Donc logiquement non expulsable pendant l’examen de son dossier.
La préfecture interrogée depuis le 18 mai
Problème, comme Montpellier journal l’a déjà souligné – tout en interrogeant la préfecture sur la question sans succès depuis… le 18 mai – un déposant ne reçoit aucune preuve de dépôt de son dossier. Du coup, en cas de contrôle policier, il est considéré en situation irrégulière et peut donc être placé en garde à vue. C’est ce qui s’est produit samedi vers 19h. Mais la privation de liberté injustifiée, déjà problématique en soit, n’a pas duré quelques dizaines de minutes – c’est-à-dire le temps qu’on peut estimer nécessaire pour les services de police pour vérifier si la personne a déposé un dossier de régularisation. Elle a en fait duré jusqu’au lendemain matin 11h soit quelques dizaines de minutes après que la Coordination eut appelé à une manifestation devant l’hôtel de police. Pour un total de 16h de garde à vue.
Sollicitée par Montpellier journal pour fournir des explications, la préfecture répond : « C’est la DDSP [police nationale], qui pourra vous répondre. Cette personne aurait été interpellée pour non respect d’un arrêté municipal. » Montpellier journal contacte donc le commandant de police Antoine Pedro qui nous renvoie sur Benoît Desmartin qui n’est pas là. Retour à Antoine Pedro qui nous envoie vers Thierry Duffner qui… refuse de nous éclairer. Étonnante réponse quand on sait que Guillaume Neau, le responsable de la communication absent pour trois jours, répond volontiers à ce type de demandes des médias. Et qu’il suffit de consulter une base de données pour cela. Thierry Duffner, lui, nous renvoie vers le parquet et…la préfecture. Qui nous avait envoyés vers la police.
Motif : « Séjour irrégulier »
Sur le non respect présumé d’un arrêté municipal, il s’agirait en fait d’une contravention car la personne sans-papier travaillait dans une épicerie qui aurait vendu de l’alcool après 18h alors que c’était interdit du fait du festival des fanfares. Qui dit contravention ne dit pas garde à vue. D’ailleurs, on l’a vu, Me Ruffel a bien confirmé que le motif était : « Séjour irrégulier ». Relancée pour fournir de véritables explications, la préfecture n’a pas donné suite.
Montpellier journal contacte également Marjorie Ghizoli, directrice départementale de la Police aux frontières qui répond : « Ce n’est pas mon service, je ne suis pas au courant parce que des dossiers comme ça, il y a d’autres services qui peuvent en traiter aussi. » En revanche, la fonctionnaire peut répondre sur la procédure générale quand ses équipes interpellent un sans-papier : « On a un relais qui est simple, c’est la préfecture. » Y compris le week-end où il y a quelqu’un de permanence. Et la nuit ? « Je ne sais pas, ça ne m’est jamais arrivé », répond la policière.
« Un fax a été envoyé en urgence à M. Baland »
La Coordination, pour sa part, raconte dans un communiqué : « Dès que nous avons appris son arrestation samedi soir et son placement en garde à vue, nous avons contacté la préfecture ainsi que la Police aux frontières. Ils nous ont affirmé ne pas avoir accès à la liste de dossiers déposés en préfecture, pour cause d’horaire et de week-end ! Un fax a été envoyé en urgence à M. Baland [le préfet] pour exiger sa libération. Ce matin, nous nous sommes rendu-es à l’hôtel de police où Hassan était enfermé, et, devant le refus catégorique de nous donner ne serait-ce qu’une information le concernant, nous avons annoncé un rassemblement devant l’hôtel de police et prévenu les médias. Une demi-heure plus tard, Hassan était libéré… Le rassemblement a donc été annulé. » De l’intérêt d’avoir un collectif derrière soi.
Et la Coordination d’ajouter : « Nous sommes heureux-ses de sa libération qui lui a évité une nuit supplémentaire dans les geôles de l’État (ou pire) pour simple défaut de titre de séjour mais nous déplorons notre impossibilité à joindre la préfecture et donc de faire valoir la promesse des représentants de l’État expulseur. Nous espérons qu’à l’avenir, cela se passera différemment. Nous restons vigilant-es concernant les agissements de la préfecture et de ses services, lesquels ne respectent souvent ni la loi ni les individus. » Claude Baland, chef des forces de police et des services de la préfecture, appréciera.
Celui-ci déclarait pourtant en janvier 2009, à une question sur les dénonciations présumées de sans-papiers par la préfecture à la police : « J’essaie, dans le cadre des textes, d’avoir une position loyale. » Et aussi : « On va appliquer cette politique gouvernementale avec fermeté et avec aussi humanité c’est-à-dire toujours l’étude au cas par cas. C’est facile à dire, difficile à faire. Mais enfin, il faut avoir du bon sens humain. »
Photo : Claude Baland, préfet de l’Hérault, chef de la police et des services de la préfecture (Mj)
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