Le quotidien régional bombe le torse alors qu’il a publié des extraits du rapport de la Chambre régionale des comptes sur la gestion de l’opéra et de l’orchestre de Montpellier, cinq jours après l’hebdomadaire L’Agglorieuse. Il a été aussi à la ramasse sur la suspension de la signature des contrats aidés (CAE) en Languedoc-Roussillon. Et on attend toujours qu’il évoque les cas de discrimination présumée de deux jeunes filles voilées au conseil régional. En 2006, c’était l’inverse : Midi Libre avait piqué une information à La lettre M sans la citer. Ce qui lui a valu une condamnation pour « acte parasitaire » et « contraire à l’éthique professionnelle ».
« Je ne vais pas faire une recherche en paternité. Je pense que c’est un raté qu’ils rectifieront très bientôt. » C’est le commentaire d’Alain Nenoff, journaliste à L’Agglorieuse, sur la publication, par Midi Libre, d’extraits rapport de la Chambre des comptes sur l’association Euterp qui gère l’opéra et l’orchestre de Montpellier. Montpellier journal a interrogé Alain Nenoff car le quotidien régional a omis de préciser que l’hebdomadaire avait publié des extraits du rapport cinq jours avant lui. Mais, visiblement, le journaliste souhaite apparaître magnanime.
Course contre la montre
Montpellier journal se tourne ensuite vers Guy Trubuil, l’auteur des deux articles sur le rapport dans Midi Libre. Question : pourquoi ne pas avoir mentionné le fait que le contenu du rapport a été révélé par L’Agglorieuse ? Réponse du journaliste : « C’est simple : c’est parce que je l’avais demandé largement avant leur article, ça fait au moins trois semaines. À partir du moment où je l’ai eu, j’en ai fait état. Pour moi, ce n’est pas une révélation, c’est une information. » Ce n’est pas complètement faux : une semaine après l’article de L’Agglorieuse, le rapport était publié, comme d’habitude, sur le site de la Chambre régionale des comptes. Donc, dans ce cas de figure on est plus dans une course contre la montre plutôt que dans la révélation d’informations qui, par exemple, tenteraient d’être dissimulées par un pouvoir.
Il y a juste un petit problème dans le raisonnement de Guy Trubuil : son deuxième article sur le sujet commence par cette phrase : « La révélation par Midi Libre du rapport de la chambre régionale des comptes sur le fonctionnement d’Euterp a provoqué quelques remous à l’intérieur de la structure associative. » Bref quand c’est L’Agglorieuse qui évoque le rapport ce n’est pas une révélation. Quand c’est Midi Libre, ça en devient une et on la mentionne même dans la première phrase de l’article.
Dans la série Midi Libre est à la ramasse, on peut aussi noter l’article sur la suspension des contrats aidés en Languedoc-Roussillon. L’information n’est donnée que le vendredi 5 novembre alors que Montpellier journal a évoqué le sujet 10 jours plus tôt. Mais au moins dans ce cas, le journaliste n’a-t-il pas parlé de « révélation ».
Informations pas données
Il y a aussi les informations qui, parfois, ne sont pas données. À l’image de la discrimination présumée dont aurait été victime deux jeunes filles voilées au sein du conseil régional. Bénéficiaires des bourses au mérite, l’une a été interdite d’hémicycle lors de la remise officielle de la bourse. Ensuite, toutes les deux n’ont pu accéder au buffet auquel elles avaient pourtant été invitées. L’affaire a été transmise au parquet et est intéressante pour deux raisons : la première c’est qu’il semble que la hiérarchie du conseil régional est impliquée dans ces faits de discrimination. La seconde c’est que la justice ne fait pas preuve de beaucoup de diligence dans l’instruction de l’affaire.
Montpellier journal interroge donc Guy Trubuil, le spécialiste des questions sociales et société à l’agence de Montpellier de Midi Libre, pour savoir pourquoi le quotidien n’a pas traité le sujet. Réponse : les filles concernées ne veulent pas témoigner et les faits sont anciens (ils remontent à un peu plus d’un an). C’est exact sauf que la Cimade qui a transmis l’affaire à la cellule de vigilance de la Commission pour la promotion de l’égalité des chances et de la citoyenneté (Copec), est tout à fait prête, on l’a vu, à communiquer sur le sujet. De plus, le courrier transmis à la cellule contient des témoignages tout à fait explicites. Mais les lecteurs du quotidien régional n’en sauront rien.
7500 euros de dommages et intérêts
En 2006, c’est tout autre chose. Nicolas Badrignans, journaliste de Midi Libre, reprend des extraits d’une interview exclusive de La Lettre M sans citer sa source. Le tribunal d’instance de Montpellier condamne le journaliste et son employeur à payer 1500 euros de dommages et intérêts à la Lettre M. Et plutôt que de faire profil bas, Midi Libre et son journaliste feront appel et iront même jusqu’en cassation ! Bilan : 7500 euros de dommages et intérêts à payer par Midi Libre pour avoir « commis un acte parasitaire à l’égard de la société M », selon la Cour d’appel de Montpellier. Et, en octobre 2009, la Cour de cassation renverra également Midi Libre dans ses cordes et ajoutera à propos de cet « acte parasitaire » qu’il est « au demeurant contraire à l’éthique professionnelle ».
[Mise à jour le 7/11 à 16h35 : suite à une remarque pertinente d'un lecteur, remplacement de "publication du rapport" par "publication d'extraits du rapport"]
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4 commentaire(s)
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à 19 h 06 min
Historiquement Midi-Libre représente une émanation historique aux yeux du grand public de la presse Résistante face au nazisme qui a baigné la France sous l’occupation.
Plus de 65 ans après on s’en sert même plus pour allumer le feu.Il emballe ce Midi-libre à merveille les dépouilles de chiens écrasés ou occupe le rôle incontournable de torche -fondement pour épouser sans détour les périmètres dentelés de l’établissement politique local.
Nous citoyens libres,Il ya longtemps que nous savons que le Midi n’est plus Libre comme ce quotidien voudrait nous le faire croire.Une information de caniveau,nous savons à quoi nous attendre.Du bon usage de l’information de la vraie , de l’info de Resistance,nous l’avons plutôt dans
Montpellier Journal,ou l’Agglorieuse.Car dire la vérité aujourd’hui à travers la presse à Montpellier revient aujourd’hui à devenir suspect.Alors quand la presse vendue siphonne l’info chez la Resistance,nous lecteurs on a plus envie de rigoler les amis.
HUBERT BORG
à 3 h 37 min
Merci. C’est ce genre d’article qui fera avancer la critique des médias ( bien qu’elle soit déjà très convaincante ). Et vive le monopole de la PQR…
à 16 h 31 min
je suis surpris de lire qu’il y aurait eu publication du rapport de la chambre régionale des comptes sur l’association euterp par quelque journal car
1°celui ci n’est disponible au public que depuis le 3 novembre
2° le rapport fait 62 pages
alors pour avoir l’info avant le 3 il y aurait eu des fuites…..et n’en faire part que de quelques lignes on ne peut pas vraiment parler de publication.
à 20 h 29 min
@trimon leon : vous avez parfaitement raison, j’ai modifié l’article.
Ceci dit, je pense que L’Agglorieuse, Midi Libre et 7L TV avaient l’intégralité du rapport avant le 3 novembre.