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Le Lundi 11 juillet 2011 à 18:29

Hélène Mandroux est-elle vraiment fidèle à ses fameuses « valeurs » ?


Les actes du maire de Montpellier semblent parfois éloignés de l’humanisme, de la fraternité et de la proximité qu’elle se plaît à mettre en avant. De plus, certains choix sur des dossiers touchant son ami Francis Navarro peuvent évoquer une forme de favoritisme. Premier volet de l’enquête sur Hélène Mandroux. Deuxième volet à venir : quel avenir politique pour Hélène Mandroux ?

Hélène Mandroux le 29 juin 2011 à Montpellier (photo : J.-O. T.)Dans cet article, vous allez lire des informations que vous n’aurez pas lues ailleurs. Pensez à faire un don à Montpellier journal s’il vous a intéressé.

« Être bien dans sa peau, pouvoir se regarder dans une glace, droit dans les yeux, être fidèle à soi-même et à ses idées. » C’est une des clés du bonheur que donne Hélène Mandroux dans son livre d’entretien (p76) publié en octobre 2010 (1). Plus loin, Jean Kouchner demande (p263) : « Qu’aimeriez-vous que les Montpelliérains retiennent de vous ? » Réponse du maire de Montpellier : « Qu’ils soient assurés que j’essaie de faire au mieux, que je n’ai jamais été malhonnête. »

Hélène Mandroux se passionne pour le don d’organes
Depuis qu’Hélène Mandroux a rencontré Francis Navarro fin 2008 et qu’il est devenu un ami très proche, certaines décisions font douter de l’impartialité du maire. Francis Navarro est professeur au CHU de Montpellier, responsable de l’équipe chirurgie digestive B et spécialiste de greffe. Conséquence directe : depuis sa rencontre avec le chirurgien, Hélène Mandroux s’est engagée pour le don d’organes. Jusque là, rien que de très louable pour la citoyenne Mandroux.

Mais le maire Mandroux fait dépenser à la ville des dizaines de milliers d’euros en affichage public et en campagne de publicité dans les journaux. Notamment une pleine page dans Le Monde (22/06/10) pour dire « oui aux donneurs, non au trafic ». Le professeur Navarro est lui aussi en première ligne pour dénoncer le trafic d’organes notamment via une pétition lancée en avril 2008.

Assise au premier rang
En mai 2010, le don d’organes était le thème principal de la Comédie de la santé. Francis Navarro participe à une conférence avec, assise au premier rang, Mme le maire. Une semaine après, la mairie communique sur la 10e journée nationale de réflexion sur le don d’organes et organise une table ronde à la maison des relations internationales. Le maire et Francis Navarro y participent. Le 22 juin 2011, c’est une conférence débat qui est organisée au Corum « en présence d’Hélène Mandroux ».

Pour chaque événement, les équipes de la ville et l’agence de communication Anatome sont mobilisées. Sont aussi prévues : « Une œuvre d’art implantée dans un lieu fréquenté et une cérémonie annuelle pour remercier les familles de donneurs. » Un livre est aussi annoncé pour octobre. (Montpellier notre ville, juillet 2011)

Pas dans le programme de la liste pour les municipales
Le maire dit vouloir faire de Montpellier « une capitale du don d’organes » (Midi Libre, 16/06). On pourrait très bien considérer que, même si le sujet relève plutôt des compétences de l’État, c’est le droit d’une ville de se choisir un tel cheval de bataille surtout quand ce dernier vise à sauver des vies. Problème, cela ne figurait pas dans le programme de 30 pages de la liste Mandroux pour les municipales de mars 2008. Et pour cause : le rapprochement du maire avec le professeur Navarro se situe, on l’a vu, plus tard. À la décharge du maire, on notera qu’aucune voix ne s’est élevée pour s’opposer à ces actions. Ni dans la majorité, ni dans l’opposition municipale.

Autre sujet impliquant Francis Navarro : le site de l’ancienne École d’application de l’infanterie, abandonnée par le ministère de la défense mi-2010. En juin 2009, « Hélène Mandroux lance un appel à idées innovantes pour la reconversion du site de l’EAI » . Parmi les soixante candidatures reçues, la ville en retiendra six le 31 mars 2010, dont celle du projet Montbiotech présenté par une équipe composée notamment de Francis Navarro pour le « pôle industriel » et de Gilles Scotto di Carlo, chargé de la « coordination » et ami du chirurgien. Les six équipes empochent 30 000 euros et « sont désormais invitées à approfondir leur réflexion ».

Projet favorisé par la mairie ?
Francis Navarro a-t-il suscité l’appel à idée ? La mairie a-t-elle favorisé voire aidé, notamment via ses services techniques, le projet Montbiotech ? Certains l’affirment. Vrai ou pas, le doute ne peut qu’exister compte tenu des relations intimes entre Francis Navarro et Hélène Mandroux. Et ce en dehors de tout jugement sur la qualité du projet. Pour clore le chapitre Navarro, soulignons que deux des filles du chirurgien ont été embauchées à la mairie : Elena à l’état civil et Clara à la Maison des relations internationales. La première n’y travaille plus mais la seconde est toujours en poste.

« Je ne suis pas une organisatrice. Ma façon d’être est différente, j’humanise mes relations. » C’est ce que déclarait Hélène Mandroux dans une interview à Midi Libre le 16 juin. Quiconque a déjà salué le maire pourra confirmer que ce n’est pas via sa poignée de main molle et fugitive et son regard fuyant qu’Hélène Mandroux fait passer son humanité.

Remercié le jour de ses 50 ans
Avec ses collaborateurs, ce n’est pas mieux. Tout récemment, elle décide de changer son cabinet. Motif officiel : Christian Assaf, son directeur, a souhaité quitter son poste pour se ménager la possibilité de se présenter aux législatives de 2012. Ce qui est exact mais le maire va plus loin et plutôt que de nommer Alban Zanchiello, le directeur adjoint, un temps pressenti pour remplacer son ami Christian Assaf, elle le remercie – le jour de ses 50 ans – et nomme un nouveau cabinet avec comme directeur Gilles Boulet, proche de Francis Navarro et franc-maçon comme lui (2).

C’est une victoire pour le chirurgien qui demandait depuis longtemps la tête de Christian Assaf. Il livre sa version du changement de cabinet : « Je crois qu’à un moment donné, elle s’est sentie seule, plus protégée par son cabinet. Elle n’avait plus le contrôle sur Assaf et son équipe, cela lui était devenu insupportable et, un jour, elle a craqué! » (Midi Libre, 20/06)

« Il n’y a pas de séparation »
Hélène Mandroux donne une version différente : « Il n’y a pas de séparation. Chacun a le libre choix de faire une carrière politique. » (TVSud, 17/06, vers 4’) Deux jours plus tôt elle déclare : « Je le soutiendrai. » (Midi Libre, 16/06). Tout en rappelant, le matin du 17, un usage du PS qui voudrait que lorsqu’un sortant socialiste ne se représente pas, c’est une femme qui doit être investie. Or Christian Assaf vise la 2e circonscription où André Vezinhet est le sortant. Une façon de dire pour Hélène Mandroux qu’elle n’est pas favorable à la candidature Assaf.

Mais le maire ne s’arrête pas là. Elle demande à la direction nationale de remplacer Christian Assaf par Gilles Boulet à la direction collégiale de la fédération socialiste de l’Hérault sous tutelle depuis l’automne 2010 : « Un directeur de cabinet n’a de lien avec le national que parce qu’il est mon directeur de cabinet », explique-t-elle (L’Agglorieuse, 28/06). Pour l’instant, Solferino n’a pas suivi.

« C’est très dur à vivre »
Cyril Lozano, le directeur de la communication n’est pas mieux loti. Cela fait environ huit mois qu’il est sur la sellette et Hélène Mandroux le laisse dans l’incertitude quant à son avenir. Explication : « Dans les journaux, il est annoncé une fois que Laurent Blondiau va me remplacer, une autre fois Jean Kouchner ou même Gilles Boulet. De fait, ces informations ne sont pas vraies mais ces informations sortent et ne sont pas démenties. Pour moi, c’est très dur à vivre. Cela fait trois ans que je suis dir’ com’, j’ai fait notamment la campagne des régionales contre Georges Frêche et ça n’a pas été simple. J’estime du coup qu’il y a une forme d’injustice majeure à mon égard parce que je me trouve dans une situation très difficile. » Un nouveau directeur de la communication est de nouveau annoncé mais la nomination n’a pas encore été officialisée.

Claude Bosom, directeur de cabinet pendant quelques mois et remercié au début de l’été 2008, déclare à propos de son limogeage : « Trois ans après, je vis toujours avec ce traumatisme. » Il refuse de donner des détails et précise simplement à propos de son départ : « Je n’ai pas été très bien traité au début mais après, ça s’est arrangé. » Ceci dit, avant que Montpellier journal le contacte, on nous avait raconté une partie de l’histoire : il devait signer l’achat d’un appartement le matin. L’après-midi il avait rendez-vous avec le maire qui aurait été au courant de cette signature. Mais Hélène Mandroux n’aurait rien fait pour lui suggérer de la reporter alors qu’elle savait qu’elle allait le remercier et que donc ce n’était peut-être pas la meilleure situation pour acheter un appartement. Quelques semaines plus tard, Claude Bosom quittait Montpellier pour Narbonne.

Petites humiliations
On peut enfin citer les petites humiliations qu’Hélène Mandroux fait souvent subir en pleine conférence de presse à la responsable de son service de presse plutôt que d’attendre la fin de la réunion pour lui faire part de ses griefs. Ou encore cette anecdote rapportée par plusieurs personnes : Hélène Mandroux se présente au niveau -2 de la mairie devant l’ascenseur. La porte s’ouvre, l’ascenseur est occupé par des agents municipaux. Plutôt que d’attendre ou de monter avec eux, Mme le maire leur demande de sortir et rejoint les étages de l’hôtel de ville.

Autres exemples de non adéquation entre le discours et les actes : au printemps 2010 elle coupe la publicité à La Gazette de Montpellier tout en déclarant dans son livre sorti à l’automne (p165) : « Conditionner des annonces publicitaires aux contenus rédactionnels, c’est le contraire de la liberté de la presse. » Pendant les régionales de 2010, elle pointe du doigt ceux qui ne respectent pas les décisions de la direction nationale du Parti socialiste en soutenant Georges Frêche. En 2002, elle s’était pourtant présentée aux législatives contre la candidate officiellement soutenue par le PS en vertu d’un accord avec les Verts.

Enfin, dans son livre, Hélène Mandroux affirme (p 102) : « Georges Frêche dit que « La politique, c’est la guerre. » Moi je dis que la politique c’est l’humain. » Si le maire est certainement moins brutale que Georges Frêche, elle n’en utilise pas moins parfois des métaphores violentes. À propos du remaniement entre ses adjoints : « Je vais couper des têtes. » (L’Agglorieuse, 28/06) Lorsqu’elle voulait prendre la présidence de l’agglo, interrogée sur les conséquences d’une éventuelle absence de soutien de la part de certains conseillers municipaux, elle lâche : « Le couperet tombera. » (Direct Montpellier plus, 3/09/09)

J’ai sollicité dès mercredi soir un entretien avec Hélène Mandroux et/ou les membres de son nouveau cabinet. Samedi, il m’a été proposé un rendez-vous avec le maire le 18 juillet que j’ai accepté. Le point de vue du maire sur le contenu de cet article et sur celui à paraître avant mercredi sera donc publié la semaine prochaine. [Mise à jour le 19 juillet à 9h05 : finalement l'entretien a été annulé par le maire.]

Sollicité, Francis Navarro n’a pas rappelé Montpellier journal. Après un premier appel jeudi après-midi, il était convenu que Francis Navarro me rappelle. Ce qu’il n’a pas fait. Je l’ai donc rappelé vendredi vers 15h. Il était une nouvelle fois convenu que Francis Navarro me rappelle pour confirmer un rendez-vous en fin d’après-midi. Ce qu’il n’a pas fait. S’il souhaite s’exprimer, je reste à sa disposition.
[Mise à jour le 12/07 à 17h10 : Francis Navarro a rappelé Montpellier journal lundi soir. Sa réaction a été publiée dans un article séparé.]

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► Lire aussi :

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(1) Maire courage – Les vérités d’Hélène Mandroux – Entretiens avec Jean Kouchner – Au diable Vauvert, 265 pages, 18 €.
(2) «Je suis franc-maçon et très attaché aux valeurs de la franc-maçonnerie. Malheureusement, la politique a rendu certains de ses membres amnésiques. » (Francis Navarro, Midi Libre, 20/06)


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