Le philosophe montpelliérain fustige dans son dernier livre la « religion du progrès » de la gauche moderne et en appelle à « construire un langage commun » et un « immense front populaire » sur le modèle de la Résistance pour « trouver un moyen de sortir d’un système dans lequel la vie des gens ordinaires dépend du bon vouloir de minorités privilégiées qui contrôlent la richesse et l’information ».
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« Être du côté du peuple est dans le code génétique de la gauche. » C’est ce que déclarait récemment un cadre du Parti communiste à Libération (5/01). Pas sûr que Jean-Claude Michéa soit d’accord avec cette affirmation et ce qu’elle sous-tend comme définition de « la gauche ». En effet, lors de sa conférence du 9 décembre (1), le philosophe Montpelliérain a été interrogé sur l’histoire du clivage gauche/droite. Et aussi sur la question de savoir si ce clivage n’en venait pas « à incarner une zone de passage dans laquelle se recompose en permanence les frontières d’une seule et même idéologie commune, propre aux deux camps que sont la droite et la gauche ».
« Où peut-on trouver une seule ligne
où Marx se présente comme un homme de gauche ? »
« Ça c’est le centre du Complexe d’Orphée (2), répond Michéa. C’est une leçon d’histoire. C’est-à-dire que, pour comprendre ce divorce [entre la gauche et le socialisme], la première chose qui m’a mis la puce à l’oreille c’est quand je me suis dit […] : où peut-on trouver […] une seule ligne où Marx se présente comme un homme de gauche ? Et en allant plus loin, c’est pareil pour les socialistes du XIXe siècle. […] J’ai relu le cours de 1895-96 de Durkheim sur le socialisme. À aucun moment Durkheim ne mentionne le moindre rapport entre la gauche et le socialisme au XIXe siècle. Le grand tournant c’est l’affaire Dreyfus. »
Michéa explique dans un entretien au Nouvel Observateur (22/09), de façon plus claire que lors de sa conférence, le système politique « tricolore » en place alors : « Jusqu’à cette époque, la gauche – nom sous lequel on regroupait alors les différents courants libéraux et républicains – avait toujours combattu sur deux fronts. D’un côté, contre le «péril clérical et monarchiste» – incarné par les «blancs» de la droite conservatrice et réactionnaire – de l’autre, contre le «danger collectiviste» – symbolisé par les «rouges» du camp socialiste fermement attachés, quant à eux, à l’indépendance politique du prolétariat. […]
Ce n’est qu’en 1899 – face à l’imminence d’un coup d’État de la droite d’Ancien Régime et de ses nouveaux alliés «nationalistes» – que la gauche moderne va véritablement prendre naissance, sur la base d’un compromis – au départ purement défensif – entre les «bleus» de la gauche originelle et les «rouges» du mouvement ouvrier (et cela malgré l’opposition farouche des anarcho-syndicalistes).
C’est donc ce compromis historique ambigu entre libéraux, républicains et socialistes – compromis scellé contre la seule «réaction» et qui allait donner à la gauche du XXe siècle sa mystique particulière – qui s’est trouvé progressivement remis en cause, au début des années 1980, à mesure que s’imposait partout l’idée que toute tentative de rompre avec le capitalisme (c’est-à-dire avec un système qui soumet la vie des gens ordinaires au bon vouloir des minorités privilégiées qui contrôlent le capital et l’information) ne pouvait conduire qu’au totalitarisme et au goulag.
C’est avant tout dans ce nouveau contexte que la gauche officielle en est venue à renouer – sous un habillage antiraciste et citoyen – avec ses vieux démons modernistes du XIXe siècle, lorsque sous le nom de «parti du mouvement» elle avait déjà pour mot d’ordre «ni réaction ni révolution».
« Cette disparition progressive
des anciens partis blanc et rouge
au profit d’un antagonisme électoral
intérieur au seul parti bleu
explique bien des choses »
Et comme la droite d’Ancien Régime a elle-même cédé la place à celle des adeptes du libéralisme économique de Tocqueville et de Bastiat (qui, on l’oublie trop souvent, siégeaient tous les deux à gauche), on peut donc dire que l’opposition de la droite et de la gauche, telle qu’elle fonctionne aujourd’hui, ne constitue plus, pour l’essentiel, qu’une réactualisation de certains clivages qui, à la fin du XIXe siècle, divisaient déjà le vieux «parti du mouvement» (on dirait maintenant le parti de la croissance et de la mondialisation). Cette disparition progressive des anciens partis blanc et rouge au profit d’un antagonisme électoral intérieur au seul parti bleu explique bien des choses. »
Pour illustrer son propos, le 9 décembre, Michéa cite trois définitions que des membres du Parti socialiste ont récemment donné du socialisme : « Jean Glavany, ancien ministre de l’agriculture : « Le parti de la science, du progrès et de la raison. » Pas un mot sur les travailleurs. […] DSK – vous connaissez sans doute – au début de l’année, dit : « C’est le parti de l’avenir, de l’espoir et de l’innovation. » Et ces jours-ci, Vincent Peillon dit : « Le socialisme c’est le parti du mouvement, de la réforme et de la modernité. » C’est exactement la définition de la gauche libérale avec les quelques républicains de progrès qui gravitent autour au XIXe siècle. »
« Droit ancestral des paysans » versus « être moderne »
Commentaire de Jean-Claude Michéa : « À partir du moment où être de gauche c’est être moderne, c’est être en avance sur son temps ou vivre avec son temps, vous mettez en place un logiciel qui s’exécute tout seul dans votre tête et qui va vous rendre difficile par exemple » d’être aux côtés des paysans contre Monsanto sur la question des semences. Ceux-ci, rappelle Michéa, ont manifesté récemment en disant : « Nous défendons le droit ancestral des paysans à posséder l’intégralité de leur récolte. » Et le philosophe imagine les interrogations de l’homme de gauche d’aujourd’hui : « Les manipulations génétiques c’est quand même moderne, Michel Onfray est partisans du clonage, etc. – et finalement je ne le sens pas trop ce combat. Quelque part, est-ce que ça ne nous ramènerait pas aux valeurs de Maurras (la terre ne ment jamais, etc) ? »
Autre exemple : « Vous êtes venu ici à une soirée organisée par Sauramps. Je suppose qu’il y a beaucoup de gens qui sont attachés au livre mais quand vous rencontrez des gens qui disent : « Mais le livre, Coco, maintenant c’est fini ! Il y a le livre numérique, Steve Jobs [référence à la tablette numérique d’Apple], etc. » Il y a, en vous, quelque chose qui s’indigne et proteste mais [aussi] un logiciel qui s’exécute : « Est-ce que je ne suis pas un vieux con ? » Vous voyez comment ce dispositif qui fait de la modernité une fin en soi, va vous paralyser pour un nombre croissant de combats. Et évidemment, en face on le sait très bien. Si jamais quelqu’un commence à se poser des questions : Clac ! « Ça ne serait pas un peu du Maurras que tu nous ressors ? Tu ne serais pas en train de faire le jeu de l’extrême droite ? Ne serais-tu pas en train, avec ta décroissance, de nous ramener à la bougie ? Etc. » […]
« Que fait-on de ces travailleurs
qui votent à droite voire à l’extrême droite
ou se réfugient dans l’abstention ? »
Ce qui me paraît dangereux – et ça a été accentué par le phénomène des primaires à l’américaine – c’est qu’on finisse par dire que le grand clivage en France c’est celui qui opposerait le peuple de gauche et le peuple de droite. Ça veut dire non pas un clivage classe contre classe mais religion contre religion. Jamais on n’arrivera à quelque chose tant qu’on en reste à cette division du peuple. Je ne parle pas de la division de la gauche et de la droite – je ne demande pas la réconciliation des états-majors. Ce qui me terrifie ou m’inquiète depuis le début c’est : que fait-on de ces travailleurs qui votent à droite voire à l’extrême droite ou se réfugient dans l’abstention ? Quand on a 30 % des ouvriers qui votent pour le Front national, ou bien on dit, façon intellectuel de gauche-Inrockuptibles, : « C’est bien la preuve que les ouvriers sont des cons, des bidochons, etc. » Ou on dit : « C’est peut-être vous qui êtes cons aux Inrockuptibles. » C’est-à-dire – et Orwell analysait le problème : qu’est-ce qui fait que ces gens en sont arrivés à une telle exaspération ? Le discours que vous tenez et ce que eux vivent, est tellement contradictoire que vous ne leur laissez plus d’autre solution pour exprimer leur colère et leur exaspération que ça (3).
Comment faire pour reconstruire un front populaire ? C’est un travail parce que tout le travail fait par la bourgeoisie libérale c’est de diviser ce peuple. Je prends trois exemples : opposer les travailleurs salariés aux travailleurs indépendants. […] (« Vous les salariés quand vous rentrez, vous n’avez pas la comptabilité, l’Urssaf, etc. »). Opposer les salariés du privé et du public. (« Oui mais vous les fonctionnaires… ») Opposer les travailleurs de souche et les travailleurs étrangers.
« Les gens ordinaires c’est-à-dire
tous ceux qui acceptent de vivre de manière décente
sans chercher à s’enrichir et vivre sur le dos des autres »
Tout ce qu’il faut, c’est arriver à reconstruire un front commun entre les gens ordinaires – travailleurs, ça ne veut pas dire ouvriers d’usine – c’est-à-dire tous ceux qui acceptent de vivre de manière décente sans chercher à s’enrichir et vivre sur le dos des autres. Ça fait une grande majorité de la population. Je ne dirai pas jusqu’à ce que disent les Américains (« On est 99 % contre 1% ») parce que le 1% a quand même une clientèle et une cour qui touchent 10 % de la société mais enfin il y a de quoi faire un grand front populaire.
Et pour ça, il faut construire un langage commun. C’est-à-dire que chacun s’explique, que le fonctionnaire que j’ai été, reconnaisse que j’ai un certain nombre de servitudes mais aussi un certain nombre d’avantages que d’autres n’ont pas – chaque fois que je me présentais le matin à Joffre [lycée de Montpellier], il n’y avait pas quelqu’un qui me disait : « Ah, il y a un Polonais qui a pris votre place ce matin. Ben maintenant allez à Pôle emploi. » Pareil pour l’artisan, le petit entrepreneur. Toutes ces catégories populaires sont actuellement hostiles les unes envers les autres et du coup la gauche va capter les travailleurs du service public et la droite les indépendants et les salariés du privé. Et on va avancer l’un contre l’autre pour le plus grand profit de ceux qui les exploitent en commun, sous des formes différentes.
« Reconstruire d’abord les vrais clivages »
Moi je veux en revenir tout simplement à ce qu’était la politique socialiste originelle. Ce qui ne veut pas dire le sang qui coule, les têtes qu’on coupe et les goulags qui se construisent mais reconstruire d’abord les vrais clivages. […] Il faut aller voir ces travailleurs qui sont des « decent persons » comme dit Orwell mais que leur malheur et leur condition font qu’ils vont trouver que la cause de tous leurs malheurs c’est le fonctionnaire, l’étranger, le salarié privé et inversement dans tous les sens. Et arriver à leur donner ce langage qui permette qu’ils comprennent que chacun à sa manière souffre de la logique d’un même système qui profite d’eux sous des formes et des manières différentes avec des avantages, des inconvénients, etc. C’est reconstruire un immense front populaire dont le but est […] [de] trouver un moyen de sortir d’un système dans lequel la vie des gens ordinaires – au sens d’Orwell, « ordinary decent people », il n’y aura pas beaucoup de traders de Wall street, de banquiers, de politiciens de Bruxelles, etc. – dépend du bon vouloir de minorités privilégiées qui contrôlent la richesse et l’information. Et ceci vaut pour les paysans des Inde, etc.
« Si la gauche aborde ces travailleurs
en leur disant « devenez de gauche »,
c’est leur poser une contrainte symbolique
qui fait qu’on va les éloigner »
D’après les sondages, 37% [des gens] ne se reconnaissent plus ni dans la gauche ni dans la droite et 67% (ça inclut ceux qui ne se reconnaissent pas et ceux qui se reconnaissent) disent : « Mais de toute façon, ça ne changera rien. » Ça veut donc dire qu’il se passe quelque chose dans la société. Si la gauche aborde ces travailleurs, ces employés, ces petits entrepreneurs en leur disant « devenez de gauche », c’est leur poser une contrainte symbolique qui fait qu’on va les éloigner.
Il faut trouver un langage anticapitaliste – en terme de peuple contre la nouvelle aristocratie – qu’ils peuvent entendre. Le problème a été posé dans la Première internationale quand un certain nombre de mouvements – parfois des Bakouniniens – disaient : « Quand on est socialiste, on doit être athée. Travailleur si tu veux rejoindre l’Internationale du Parti socialiste, abandonne ta religion. » Et là, Marx et la majorité de l’Internationale disaient : « Mais attendez, c’est probable que l’athéisme est plus compatible avec le socialisme [qu'avec la religion] mais on ne peut pas les diviser sur ce problème secondaire. On va dire aux travailleurs : tu viens te battre sur un programme anticapitaliste et on ne te demande pas de renoncer à ta religion, à tes symboles affectifs, à ce qui donne un sens à ta vie, tant que tu es d’accord sur l’essentiel. » […]
Ce qui m’étonne c’est qu’on ne prend jamais le modèle de la Résistance en France dans la politique actuelle. La Résistance a été le lieu et le moment où des gens venus de différents horizons – elle n’a pas traversé gauche comme droite : il y avait une gauche pétainiste, une droite résistante mais il y avait d’un côté les « decent persons » et ceux qui avaient fait le mauvais choix – ont lutté en commun. Ce qui a permis aussi des rapprochements. Et c’est grâce à ça qu’il y a eu le Conseil national de la Résistance qui allait depuis des gens venus de la droite monarchiste jusqu’aux communistes. […]
« Ces combats de la Résistance
avaient bien été des combats de front commun
entre des gens qui venaient d’horizons différents »
Il faut trouver ce langage commun minimal. […] Ces gens s’étaient retrouvés dans un programme qui pendant 30 ans a protégé, à l’intérieur d’un capitalisme limité du dehors par ce compromis politique, et a permis de faire des choses dont certaines ont été positives. En tout cas, tout notre appareil de protection sociale est né grâce à ça. Ces combats de la Résistance avaient bien été des combats de front commun entre des gens qui venaient d’horizons différents mais qui étaient d’accord sur une révolte morale et un développement politique de cette exigence morale que le programme de la Résistance, très minimale – il ne sortait pas du capitalisme, il était keynésien – a permis de mettre un coup d’arrêt pendant très longtemps à ce programme [du capitalisme].
Jusque dans les années 70, les hommes politiques de droite ou de gauche – d’ailleurs on ne se disait pas de droite à l’époque – étaient dans l’ensemble tous issus de la Résistance. […] C’est quand la génération des Giscard, Jean-François Copé, etc. qui n’ont plus rien à voir avec ce souvenir commun qu’on a pu commencer à démanteler très tranquillement quelque chose à quoi, même les hommes de droite de l’époque, étaient restés attachés. Il s’est passé quelque chose.
Si on le fait sous la forme d’un appel élargi, je suis sûr que bien des gens, des gens simples, si on leur tient ce langage qui ne vient pas heurter leur refus du libéralisme culturel (ce n’est pas ces gens-là que vous allez rallier à l’anticapitalisme avec un programme fondé sur la légalisation du cannabis comme première revendication). […]. Vous n’allez pas dire : ah oui mais il faut d’abord comprendre le délinquant. Là c’est fini. Il faut recentrer sur ce qu’est la logique du capitalisme, comment elle détruit les familles de l’intérieur, comment élever des enfants devient de plus en plus dur, comment le travail change de sens, pourquoi on se « télécomise », pourquoi on se « Carglassise », pourquoi les CDI disparaissent au profit de ce travail précaire, de ces petits boulots, pourquoi les familles sont aussi désormais éclatées […]
« Mais vous, vous n’allez pas manger vos DVD et vos CD ?
Ce qui se prépare est une crise bien pire que celle de 1929 »
Pourquoi tous ces phénomènes ? C’est à partir de là que, devant la souffrance commune induite par le capitalisme, quand on sait nommer les causes, il me semble que les gens sont prêts à entendre ce discours. Ce n’est pas un discours centriste, c’est un discours radical. C’est en radicalisant (4) le processus du système qu’on peut élargir la base des gens qui peuvent se comprendre, se tendre la main et faire tomber les barrières. Entre le fonctionnaire et le petit entrepreneur, entre l’employé et l’ouvrier étranger, etc. qui ont des intérêts communs à ce que cette logique où des marchés financiers et leurs agences de notation vont décider de votre vie – parce que si, dans deux ans, quand vous allez mettre, comme en Argentine, la carte bleue et qu’elle est avalée, que vous sortez et que vous n’avez plus rien, qu’il vous reste quatre jours dans votre frigo à manger… En 1929 et pendant la deuxième guerre mondiale, la France était encore rurale, tout le monde avait un cousin qui pouvait ramener deux œufs, un jambon, une poule. Mais vous, vous n’allez pas manger vos DVD et vos CD ? Ce qui se prépare est une crise bien pire que celle de 1929.
A partir du moment où les deux partis bleus sont d’accord sur l’essentiel (il faut rassurer les marchés financiers) et surtout « le socialisme, c’est l’art de conserver son triple A » – on l’aurait dit à Jaurès ou Marx, je ne sais pas s’ils auraient… Bon. À partir de ce moment-là, vous allez jouer aux différences électorales sur quelques problèmes sociétaux. J’avais dit, dans le film de Coline Serreau (5) : les prochaines élections se joueront sur deux-trois problèmes de société : délinquance, mariage gay, vote des étrangers. C’est mécanique de le prévoir puisque sur le plan de la critique fondamentale du capitalisme, on est d’accord : il n’y a pas d’autres alternatives.
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► Voir aussi :
- Michéa : « Jamais les nuisances du système capitaliste n’ont été aussi claires » (1/3)
- L’endettement de la France en 1848 vu par Karl Marx (2/3)
- Claude Guéant et « les civilisations » : « la stratégie du chiffon rouge » ? (extrait du Complexe d’Orphée)
- Pour un anarchisme conservateur (interview dans Le Nouvel observateur, 22/09/11)
- Interview dans Les matins de France Culture (6/10/11) :
- Entretien accordé pour le film de Coline Serreau, Solutions globales pour un désordre global (2010) :
- Conversation avec Jean-Claude Michéa (À contretemps, juillet 2008).
Dans cette entretien, il déclare notamment : « Il ne devait pas être très difficile, par exemple, de repérer dès le départ la volonté de puissance d’un Staline ; ou, puisque nous sommes à Montpellier, celle d’un Georges Frêche. Nous avons là un type d’individus au psychisme assez simple (ils ont clairement une revanche personnelle à prendre sur leur enfance) et dont le modèle d’identification politique se situe quelque part entre Néron et Caligula. Ceux qui acceptent de soutenir ce genre d’individus n’ont donc jamais la moindre excuse ; ce sont soit des complices, soit des croyants aveugles, soit des courtisans méprisables. »
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(1) C’était à l’auditorium du musée Fabre de Montpellier à l’invitation de la librairie Sauramps dans le cadre du cycle de conférences « La fabrique de philosophie » animé par Vincent Taissère. Connaissant la réticence de Jean-Claude Michéa pour la transcription de ses propos – les interviews qu’il accorde sont très majoritairement réalisées par échanges de mail – Montpellier journal ne saurait trop engager ses lecteurs à écouter le son de la conférence disponible au bas de l’article. Sans compter que cet article n’en présente que des extraits.
(2) Le complexe d’Orphée – La gauche, les gens ordinaires et la religion du progrès, Climats, 356 pages, 20 €. Ce point est aussi abordé à la fin d’Orwell, Anarchiste tory, Climats, 142 pages, 14 €.
(3) Plus loin, Jean-Claude Michéa revient sur la question de la montée de l’extrême droite. Et rappelle l’interrogation d’Orwell : « Qu’ont fait les socialistes et les communistes comme erreur pour qu’une partie du prolétariat tombe entre les mains d’Hitler ? […] Quand le fascisme et l’extrême droite montent, c’est d’abord aux socialistes – au sens global du terme – de se poser la question sur ce qu’ils sont et ont fait : « Où est notre erreur ? Qu’est-ce qu’on n’a pas fait et qu’on aurait dû faire ? » Ce n’est pas le genre de questions qu’on se pose beaucoup en général. »
Lire aussi dans Le Complexe d’Orphée la question 7, p238 à 272. Notamment cette citation d’Orwell : « Il est donc trop facile de rayer de plume le fascisme en parlant de « sadisme de masse » ou en recourant à toute autre formule facile du même acabit […]. La seule démarche possible, c’est d’ouvrir le débat sur le fascisme, d’entendre ses arguments, et ensuite proclamer à la face du monde que tout ce qu’il peut y avoir de bon dans la fascisme est aussi implicitement contenu dans le socialisme. » (Le Quai de Wigam)
(4) Ma compréhension de ce « radicaliser » : revenir à la racine de ce processus.
(5) Solutions locales pour un désordre global.
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