Sophie Dessus a prévu d’abandonner son mandat de vice-présidente du conseil général de Corrèze mais pas celui de sa commune après avoir remporté, dès le premier tour, l’élection législative dans la première circonscription de son département. Ce qui est contraire aux règles du Parti socialiste que François Hollande a dit vouloir appliquer « à la fin de l’année 2012 ».
« Député n’est pas n’importe quel mandat, c’est être représentant de la Nation. C’est représenter le peuple français. L’exemplarité sera le maître mot. Elle passe par : le non-cumul des mandats. Je ne serai plus vice-présidente du conseil général. Je soutiendrai et me conformerai à la future loi. » C’est ce que proclame Sophie Dessus dans un tract de sa campagne (extrait ci-dessous) pour l’élection législative dans la première circonscription de la Corrèze, celle qui était réservée pour François Hollande s’il n’avait pas été élu président de la République.
Règles du Parti socialiste
« L’exemplarité » de Sophie Dessus ne va pas jusqu’à respecter les règles du Parti socialiste qui l’a pourtant investie pour cette élection. En effet, dans le même tract, elle ajoute : « Je mènerai jusqu’à son terme le mandat que les électeurs d’Uzerche m’ont confié. » Et ce mandat c’est celui du maire de la commune de 3300 habitants qu’elle occupe depuis 2001.
Pourtant, le texte sur « la rénovation » adopté par une large majorité de militants du PS (76,93 % des votants) prévoit (page 5 ) : « L’interdiction du cumul d’un mandat de parlementaire et d’un exécutif local (maire ou maire-adjoint, président-e ou vice-président-e de conseil général ou de conseil régional, présidence ou vice-présidence d’un établissement public de coopération intercommunale) sera inscrit dans les statuts du Parti socialiste. » Il est donc normalement impossible, pour un membre du Parti socialiste, de cumuler un mandat de député et celui de maire. Et sur les modalités, le texte est précis : « Tout-e élu-e à une élection parlementaire abandonnera ses mandats exécutifs locaux dans un délai maximum de trois mois après la tenue du scrutin. » Ce qui nous amène au 10 septembre.
François Hollande : « Moi je respecte les décisions de mon parti »
Et François Hollande a été clair sur l’application de ce texte. C’était le 12 octobre, lors du débat de l’entre deux tours de la primaire socialiste. Celui qui n’était pas encore président de la république déclarait, face à Martine Aubry : « J’ai un principe qui est incontestable parce que je l’ai toujours pratiqué. Moi je respecte les décisions de mon parti. Qu’a décidé le Parti socialiste ? De faire que, quoi qu’il se passe en 2012, nous nous appliquerons le non-cumul à la fin de l’année 2012. Très bien, j’y suis favorable, je l’ai voté, ça sera appliqué. Et si je deviens président de la république, alors là, j’ai pris un engagement qui vaut pour l’ensemble des parlementaires, il y aura le vote d’une loi qui s’appliquera donc à tous les députés et à tous les sénateurs et ça sera le non-cumul du mandat parlementaire avec un mandat d’exécutif local. Puis-je être plus clair ? »
Regarder la vidéo (vers 14’20’’) :
François Hollande a bien déclaré : « Quoi qu’il se passe en 2012, nous nous appliquerons le non-cumul à la fin de l’année 2012. » Sophie Dessus qui dit ne pas avoir voté le texte sur la rénovation, convient que le débat a eu lieu, « il y a une majorité, il n’y a pas de souci » mais martèle néanmoins sa position : « Élue d’une petite commune, je fais de la proximité. Ce sont les gens qui me disent ce qu’il faut faire ou pas. Je veux bien voter des lois en marchant en permanence sur des moquettes en étant loin des réalités des fermes et des maisons de mes mamies où on a 400 € pour vivre mais je serais complètement déconnectée avec la réalité et je serais incapable de voter des textes adaptés aux besoins du peuple d’aujourd’hui. » Cet argument est récurrent chez les élus opposés à un strict non-cumul mais ils oublient en général de préciser que rien ne les empêche de rester en contact avec le terrain en demeurant simple conseiller municipal, général, régional, etc.
« Trouver un équilibre »
Donc Sophie Dessus est en attente de directives de Solferino ? « Bien sûr. Et du président de la république aussi, répond-elle. Il me semble que ce qu’il demandera à son gouvernement de faire voter sera important aussi. Pour, à l’arrivée, trouver un équilibre entre tout ça. » L’application stricte du non-cumul voulu par les militants va-t-il être amendé dans les prochains mois ? Il semble que certains comptent là-dessus.
Quant à Paul Alliès, secrétaire national adjoint à la rénovation, il dit avoir reçu « un nouveau mandat donné par Montebourg » dont il est un proche et affirme : « Notre intention c’est bien de poursuivre cette rénovation jusqu’au bout. » Et partout : « Ce n’est pas parce qu’on est en Corrèze et dans le fief du roi, qu’on peut y échapper. » Paul Alliès compte bien que le congrès du PS de l’automne intègre dans ses statuts le texte sur la rénovation. Mais reste néanmoins lucide : « Les résistances, il va y en avoir d’autres vu la force d’élus locaux dans leur implantation territoriale, beaucoup vont mettre du temps et même de la mauvaise volonté à appliquer les dispositions sur le non-cumul. On peut s’attendre compte tenu de ce qu’est la sociologie de ce parti, à ce qu’il y ait beaucoup de résistances de certains qui disent, comme disait Chirac : « Pourquoi s’emmerder ? » C’est-à-dire que maintenant qu’on a tout gagné, pourquoi se poser des problèmes de ce type ? »
Sollicité par Montpellier journal, Alain Fontanel, secrétaire national à l’animation des fédérations du PS, n’a, pour l’instant, pas donné suite.
► Originaire d’Uzerche, j’ai suivi d’un œil l’élection de Sophie Dessus. J’ai choisi de parler de son cas, qui n’est pas vraiment proche de Montpellier, car il me paraît être un bon exemple des « assouplissements » qui pourraient être demandés par des élus à la direction du PS sur l’application du non-cumul, sujet que Montpellier journal a suivi de près depuis plusieurs mois (voir ci-dessous).
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2 commentaire(s)
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à 21 h 25 min
L’argument sur la nécessité de garder une proximité via un mandat local n’est pas recevable.
Si avoir un mandat local est une condition pour maintenir de la proximité avec les habitants c’est que la proximité a déjà été perdue. On ne me fera pas croire qu’on comprend mieux la précarité de l’emploi en cumulant les mandats successifs et simultanés ou la pauvreté en cumulant les indemnités.
Si elle a besoin du mandat de maire pour quitter les moquettes de l’assemblée, alors elle est gravement incompétente et ses assistants parlementaires ne servent à rien non plus.
Par mon salaire je suis super proche des smicards, en y habitant je suis proche de mon quartier. Ce qui me dispense même de briguer un mandat local, pas bête, non ? Je vais peut-être breveter l’idée…
à 21 h 50 min
Soit on s’occupe bien de sa ville (même si elle est petite), alors on ne peut pas travailler correctement à l’Assemblée et inversement.
Je connais un député qui travaille beaucoup au parlement et qui délaisse complètement sa ville, laissant sa première adjointe faire le boulot d’en bas.
Seulement il touche une indemnité dans les deux cas.
J’ai l’impression que les deux salaires sont en jeu !